7 cuisiniers déboulonnent les mythes sur l’achat local

 

Des cuisiniers de tous horizons, unis par une même passion, ont à cœur de proposer des plats savoureux, concoctés avec des produits d’ici. Ils sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à mettre en valeur les aliments québécois sur leur menu. Sorcier? Pas du tout! Les sept participants à la websérie On a échangé nos cuisines! ont accepté de déboulonner certains mythes associés aux aliments du Québec. Ils insistent: manger local est possible à l’année, aussi bien au restaurant qu’à l’école et au centre de la petite enfance.

Mythe 1: Lorsqu’on commande de grosses quantités, il est plus difficile d’obtenir des produits frais et locaux.

Roch le Coq n’est pas un établissement de restauration rapide comme les autres. On y sert du poulet frit de qualité qui provient d’une ferme située à Sainte-Angèle-de-Monnoir, en Montérégie. L’ambiance y est décontractée, mais ça roule! À la succursale d’Outremont, jusqu’à 450 poulets passent par la friteuse chaque semaine, indique Evangelos Kerasiotis, cuisinier originaire de Grèce qui a grandi dans le restaurant de ses parents. «On achète de grandes quantités de poulet, mais ce n’est pas un obstacle pour réussir à avoir un produit frais et local, indique-t-il. On a un lien privilégié avec une boucherie, ce qui nous assure d’avoir suffisamment de poulet de qualité. C’est un beau produit, sans additifs ni antibiotiques, qu’on met en valeur avec des marinades légères. On veut le goûter!» Roch le Coq le propose par exemple avec une sauce piquante au miel de fleurs sauvages. «C’est important de soutenir les producteurs d’ici. J’aime ce contact de proximité. Ils connaissent bien mes besoins et savent que je respecte leurs produits, que je les mets de l’avant. C’est gagnant!»

Evangelos Kerasiotis, chef du restaurant Roch le Coq, participant à l'épisode 1 de la websérie
Evangelos Kerasiotis, chef du restaurant Roch le Coq, participant à l'épisode 1 de la websérie
Anne Paré, directrice du service alimentaire Groupe Compass Québec au Collège St-Jean-Vianney, participante à l’épisode 1 de la websérie
Anne Paré, directrice du service alimentaire Groupe Compass Québec au Collège St-Jean-Vianney, participante à l’épisode 1 de la websérie

Mythe 2: La nourriture servie en cafétéria est très peu diversifiée.

Jadis cheffe propriétaire d’un bistro gastronomique, Anne Paré a pris la difficile décision de quitter la restauration. Enceinte de sa première fille, elle s’est tournée vers l’institutionnel pour concilier plus facilement travail et famille. Depuis cinq ans, elle est directrice du service alimentaire Groupe Compass Québec au Collège St-Jean-Vianney, à Montréal. «Au départ, j’y suis allée de reculons. Finalement, j’adore ça! J’ai été surprise par la polyvalence et la diversité des plats à préparer. On est loin des menus insipides d’il y a 20 ans», souligne-t-elle. Elle se fait une fierté d’offrir des plats inspirés du monde (poké, ramen, shish-taouk, bol texan), un comptoir de paninis, des plats végétariens, un menu du jour et des boîtes de prêt-à-manger. Tout ça concocté avec une majorité d’aliments locaux. «Le but est d’avoir une belle offre pour attirer les élèves. Les jeunes s’informent beaucoup sur ce qu’ils consomment, ils sont curieux.» Les aliments du Québec occupent une place grandissante dans la cuisine de Mme Paré, «pour la fraîcheur des produits et leur diversité ainsi que pour encourager notre économie».

Mythe 3: On ne peut pas cuisiner avec des aliments frais du Québec en hiver.

Chef du bistro L’Ange cornu, à L’Assomption, Julien Poissenot-Côté n’est jamais aussi bien que dans une cuisine. Né de parents restaurateurs, il a grandi au son des casseroles. «J’aime l’adrénaline, être dans l’action. On offre une cuisine bistro, avec un menu à l’ardoise changeant, à base de produits québécois, été comme hiver. Il y a une moins grande variété de fruits et légumes en saison hivernale, mais il y a une fierté à mettre du Québec dans chaque assiette. Les clients l’apprécient vraiment.» Prévoyant, M. Poissenot-Côté fait des provisions de légumes-racines, «qui se conservent très bien pendant les mois les plus froids». Il en préserve une panoplie grâce à la fermentation, aux marinades et au sous-vide afin de jouir d’une plus grande flexibilité. Le jeune chef se réjouit également de voir de plus en plus de produits cultivés en serre l’hiver, ce qui lui permet de changer la donne et d’offrir un plus grand choix de produits québécois frais à sa clientèle qui en redemande!

Julien Poissenot-Côté, chef du bistro L’Ange Cornu, participant à l'épisode 2 de la websérie
Julien Poissenot-Côté, chef du bistro L’Ange Cornu, participant à l'épisode 2 de la websérie
Guylaine Dauphin, responsable du service alimentaire CPE Clin d’œil — Installation Jolibourg, participante à l'épisode 2 de la websérie
Guylaine Dauphin, responsable du service alimentaire CPE Clin d’œil — Installation Jolibourg, participante à l'épisode 2 de la websérie

Mythe 4: L’utilisation de produits locaux limite la créativité et l’innovation en cuisine.

À Lavaltrie, Guylaine Dauphin cuisine pour les tout-petits depuis plus de 20 ans. Responsable du service alimentaire du CPE Clin d’œil – installation Jolibourg, cette grand-maman souhaite offrir le meilleur carburant aux enfants en plein développement. La nutrition a toujours été sa passion. Depuis quelques années, elle fait l’effort de maximiser la quantité d’aliments québécois au menu, notamment pour diminuer l’empreinte environnementale et faire travailler des gens d’ici. «Ça ne limite pas du tout la créativité. Les fruits et légumes d’ici, par exemple, sont inspirants parce qu’ils sont frais, savoureux et colorés.» Elle aiguise sa curiosité, découvre de nouveaux aliments et bonifie ses recettes grâce à de petits gestes. Son gâteau aux pommes, désormais classique, est aujourd’hui fait de pommes rouges d’ici, et ce, à l’année. Elle achète ses fraises d’un producteur local, «plus goûteuses», plutôt que de les commander en sacs, surgelées. Les aliments québécois ont tout pour plaire aux petits palais.

Mythe 5: Acheter des produits du Québec n’est pas économique.

Samuel Plamondon, jeune chef et gérant du resto-pub Le Picoleur, à Saint-Hyacinthe, crée des plats originaux – du cristal de bière aux charcuteries maison – à partir d’aliments du Québec. Pour celui qui a commencé comme plongeur à 16 ans et qui a gravi les échelons jusqu’à officier derrière les fourneaux de restaurants de Calgary, le prix des aliments d’ici n’est pas un frein, au contraire! La fraîcheur des produits du Québec, parfois plus chers à l’achat, permet une réduction des pertes et augmente la rentabilité, souligne-t-il. Dans ses frigos, on trouve à l’année de la laitue vivante de Drummondville. L’été, il achète ses légumes fermiers à proximité. «En saison, les choux-fleurs se conservent jusqu’à 14 jours. Si je commande des caisses du Mexique, ils brunissent en quelques jours et je dois les transformer.» Il est aussi d’avis que la viande d’ici n’est pas plus dispendieuse. Encore mieux: il mise sur l’économie circulaire. La microbrasserie Brasseurs du Monde, voisine du Picoleur, fait partie de la même entreprise et achète beaucoup de grains. «On fournit la drêche à une ferme laitière, qui élèvent des bœufs juste pour nous. La ferme approvisionne la fromagerie du coin qui, à son tour, nous fait des prix compétitifs. Alors que les prix des aliments grimpent, plusieurs nous envient.»

Samuel Plamondon, chef du resto-bar Le Picoleur, participant à l’épisode 3 de la websérie
Samuel Plamondon, chef du resto-bar Le Picoleur, participant à l’épisode 3 de la websérie
Paul-André Miron Piché, spécialiste des solutions client de la division Montréal de Service alimentaire Gordon, participant à l'épisode 3 de la websérie
Paul-André Miron Piché, spécialiste des solutions client de la division Montréal de Service alimentaire Gordon, participant à l'épisode 3 de la websérie

Mythe 6: Quand on s’approvisionne chez un distributeur ou un grossiste, c’est difficile d’avoir accès à des produits du Québec.

«On a environ 400 producteurs et transformateurs québécois dans notre inventaire», souligne Paul-André Miron Piché, spécialiste des solutions client de la division Montréal de Service alimentaire Gordon. Il a aussi été chef restaurateur pendant des années à Montréal et a même été propriétaire d’un camion de cuisine de rue. «Dans nos salons de vente, le quart du plancher est consacré aux aliments du Québec et on voit un réel engouement. On met de l’avant les fruits et légumes, les viandes, les produits transformés d’ici.» Plusieurs cuisiniers pensent à tort que le recours à un distributeur alimentaire réduit les occasions de s’approvisionner en aliments québécois. Entreprise américaine, Service alimentaire Gordon fait face à ce préjugé. Pourtant, M. Miron-Piché et ses collègues travaillent de près avec les producteurs, petits et grands, ainsi que les fournisseurs québécois. «On met beaucoup d’efforts à développer une belle gamme de produits locaux. C’est ce qui nous distingue. On a un réel amour du travail créatif et du produit».

Mythe 7: Les institutions et les restaurants n’accordent pas d’importance à la provenance des produits qu’ils commandent; seul le prix importe.

«C’est de moins en moins vrai. Nos bons clients, qui sont des restaurateurs, ne font jamais du prix leur premier critère», explique Stephane Renaud, spécialiste des solutions client de la division Québec pour le distributeur Service alimentaire Gordon. «Ils misent plutôt sur la qualité du produit, sa provenance et l’éthique des producteurs.» Les restaurateurs optent par exemple pour des produits issus de la pêche durable. Ils sont de plus en plus nombreux à s’intéresser à l’achat local, à vouloir s’approvisionner en légumes de saison. Fort d’une expérience de plus de 40 ans en restauration, M. Renaud épaule la clientèle dans ses démarches. «Je fais de la formation, je teste beaucoup de nouveaux produits, je propose des menus où les produits québécois sont en valeur. Je crois beaucoup en la valeur ajoutée. On ne parle même pas de prix. On est là pour parler de produits, de développement, et pour amener le client ailleurs.»


 

Stephane Renaud, spécialiste des solutions client de la division Québec de Service alimentaire Gordon, participant à l'épisode 3 de la websérie
Stephane Renaud, spécialiste des solutions client de la division Québec de Service alimentaire Gordon, participant à l'épisode 3 de la websérie

 

À propos de la websérie On a échangé nos cuisines!

Que se passe-t-il quand des cuisiniers quittent leurs fourneaux pour officier dans une autre cuisine? La websérie On a échangé nos cuisines! permet une incursion au restaurant, à la cafétéria, au CPE et dans un service alimentaire pour découvrir comment le métier de cuisinier varie d’un environnement à l’autre. Entre méthodes de travail et clientèles différentes, la volonté de s’approvisionner en produits locaux et la passion ont le dernier mot priment sur tout le reste. Découvrez ici les trois épisodes qui mettent en vedette des cuisiniers de différents établissements membres du programme.

 

À propos d’Aliments du Québec au menu

Aliments du Québec au menu est un programme de reconnaissance créé par Aliments du Québec s’adressant aux restaurants et institutions qui valorisent les produits du Québec dans leur menu. Le volet Restaurant a été développé en collaboration avec l’Association Restauration Québec. Le volet Institution a été développé en collaboration avec Équiterre, avec le soutien du ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec. À ce jour, plus de 700 restaurants et 300 institutions de partout au Québec sont reconnus par le programme.


Cet article est présenté en collaboration avec: